En introduction, j'aimerais m'excuser. Ce sera le
En introduction, j'aimerais m'excuser. Ce sera le troisième message sur le même thème, et je sais que la plupart des gens qui viennent ici n'ont vraiment pas l'intention d'avoir un enfant dans l'immédiat, donc se contrefoutent un peu du sujet : "J'essaie de faire un bébé, c'est pas facile tous les jours". Promis, dès que j'ai mes règles, je recommence à parler de choses plus universelles : le temps, ma (non-)recherche d'emploi, les chats, la bouffe... En attendant, excusez-moi, mille fois, mais je n'arrive à penser qu'à ça. Ceci étant dit, rien ne vous oblige à lire ce message si mes élucubrations sur la reproduction commencent à vous saouler royal :)
Voilà, au fil de mes lectures, des blogs, des forums, de ce qu'on m'a dit, j'en suis venue à me demander : a-t-on le droit de se plaindre quand ça fait moins d'un an qu'on essaie de faire un bébé ? Car on sait tous qu'avant un an d'essais, il ne sert à rien de demander un avis médical, on reste dans la sphère du normal. Je me suis vraiment interrogée sur le sujet. Je me suis dis : "Artémis, détache-toi un peu de tes petits sentiments perso, sois objective."
Et ma réponse est quand même oui. Je dirais qu'on a le droit de se plaindre quand ça fait plus de trois mois qu'on essaie. Surtout quand on est nullipare (c'est à dire quand on n'a jamais eu d'enfant). Alors trois mois, ça vous paraît peu, je le conçois. Mais trois mois, c'est la limite où le jeu paraît moins drôle. Le premier mois, on n'essaie pas vraiment et quand on découvre qu'on n'est pas enceinte, on trouve ça normal. Le deuxième mois, on essaie avec application, et quand on n'est toujours pas enceinte, on se dit que statistiquement, ç'aurait été trop beau. Le troisième mois, on commence à se prendre sérieusement la tête et quand on se découvre à nouveau vide, on se dit qu'on n'a pas de chance. A partir de là, il ne faut qu'un nouveau mois pour passer de "on n'a pas de chance" à "on est maudits", et encore un mois pour passer de "on est maudits" à "on n'y arrivera jamais".
Ca vous paraît rapide, et bien définitif, mais en vérité, cinq cycles, c'est tout sauf rapide. Au bout de six mois, on a déjà vu passer trois saisons (dans mon cas : j'ai commencé en hiver et dans deux jours, ce sera l'été). Oui, si on pense rationnellement, cinq essais à 20% de chance de réussite chacun, ce n'est rien. Mais à côté de nous, tout change sauf ça. Et forcément, on commence à se demander s'il n'y a pas un problème. Qu'est-ce qui nous prouve qu'il n'y a pas de problème ? Pourquoi autour de vous tout le monde balaie nos angoisses comme si elles n'avaient pas de raison d'être ?
Je dirais en fait qu'on n'a pas le droit de se plaindre à partir du moment où on a réussi à faire un enfant en moins d'un an. Et même à la réflexion, qu'on n'a pas le droit de se plaindre à partir du moment où on a réussi à faire un enfant tout court. Même si il a fallu trois fécondation in vitro pour ça, parce qu'il y a aussi des gens pour qui ça ne marche jamais. Ceux-là sont vraiment les plus à plaindre.
Ma soeur la sage-femme me disait que dans certains dossiers, genre dans celui d'une femme de 40 ans qui est bien enceinte pour la première fois après six FIV et dix fausses-couches (bon, j'ai peut-être un peu grossi le trait), il était indiqué "grossesse précieuse" (ou quelque chose du genre), comme s'il fallait y faire particulièrement attention. Je trouve ça un peu injuste pour les autres. Alors je dis pas, si la fille a 16 ans, qu'elle a fait un déni de grossesse pendant six mois et que, ne pouvant plus avorter (elle a bien essayé de se renseigner pour savoir si elle pourrait pas faire faire ça discrètement, genre avec une très grosse aiguille à tricoter, mais ça coûtait trop cher relativement au montant de son argent de poche et c'était un peu risqué niveau hygiène tout ça), elle a décidé d'accoucher sous X, peut-être qu'effectivement, on peut se dire que si elle perdait l'enfant, ce ne serait pas un drame (et encore !). Mais prenons ma copine M., celle qui est tombée enceinte en deux jours top chrono. Eh bien elle nous disait qu'avant que son compagnon donne son feu vert pour faire un enfant, elle se mettait à pleurer à chaque fois qu'on lui annonçait une grossesse. Et pas de joie, hein, de dépit. C'est le désir d'enfant qui est maladif et plus il est fort, plus le temps qui passe semble long, qu'on soit une hyperfertile qui s'oblige à prendre une contraception ou une infertile dans un parcours de PMA.
Ca ne fait pas cinq mois que je veux un enfant, ça fait dix ans que toutes les annonces de grossesse me font crever de jalousie et en cela je me sens (presque) aussi légitime quand je fonds en larmes parce que mon test est négatif que la fille de 36 ans qui est en PMA depuis trois ans et qui a vraiment envie d'un enfant depuis "seulement" quatre ans. On ne peut pas se détacher de ses petits sentiments perso, on ne peut pas être objective dans ce domaine. On sera objective une fois que ça aura marché. On se dira : "J'ai quand même été super chanceuse d'avoir réussi naturellement en six mois" ou "Oui, j'ai souffert pendant cinq ans, j'ai eu un courage digne d'un chevalier en pleine croisade, j'ai tout enduré, l'attente interminable, les examens intrusifs, les piqures, les traitements, les complications, les fausses-couches, mais ça en valait la peine". Et en attendant de pouvoir se congratuler ou se regarder de haut, on fait ce qu'on peut.
Heureusement, j'ai un super amoureux :