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Petites calomnies entre amis
Petites calomnies entre amis
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19 décembre 2013

J'en parlais déjà hier. A 22 ou 23 heures. Il

J'en parlais déjà hier. A 22 ou 23 heures. Il faut croire que cette histoire m'obsède pour que j'éprouve le besoin d'en reparler aujourd'hui. A 6 heures du matin.

(Non, si vous voulez tout savoir, ça ne m'a pas à ce point travaillé pour que je me lève à 6 heures du matin : c'est Apollon qui est parti travailler qui m'a réveillée. L'idée, elle, m'a juste empêchée de me rendormir. Il faut néanmoins que ce soit une idée très forte pour produire cet effet, car des idées d'articles, j'en ai à toute heure de la journée, et plus spécialement le soir en me couchant, et même si elles tournent et retournent dans ma tête, elles m'empêchent rarement d'attendre que le jour soit levé -voire que plusieurs autres jours soient levés- pour en parler.)

Je crois que peu de gens ont compris mon idée de garder le prénom de ma future fille secret. Mon mari l'a tellement peu comprise qu'il ne m'a même pas posé la question de savoir si je souhaitais qu'on en parle avant de le jeter en pâture à sa famille. En l'épelant. Plusieurs fois. Comme s'il ouvrait mon ventre et qu'il montrait mon bébé tout petit, tout nu, tout rouge et tout fripé à tout le monde. Vous direz sans doute que je fais une histoire pour rien, mais ça m'a choquée. Et le fait qu'il me dise : "Mais fallait le dire, si tu voulais qu'on garde ça secret !" (et quand j'aurais pu le dire ? On n'était pas sorti du cabinet d'échographie depuis une demi-heure) au lieu de "Excuse-moi", ça m'a aussi blessée (mais sans doute que je ne devrais pas me formaliser car Apollon fonctionne toujours comme ça : s'il me marche sur le pied, il ne dit pas "Pardon" mais "Et qu'est-ce qu'il foutait là, aussi, ton pied ??").

Ce prénom, je le gardais pourtant secret depuis plus de cinq ans. J'en avais parlé à deux personnes en tout, en cinq ans, et toujours avec beaucoup d'hésitations. A la première, je l'ai dit parce qu'elle avait appelé un personnage de roman de la même façon et que je trouvais ça drôle. Et à la seconde, parce que c'était mon mari et qu'il me semblait qu'il fallait tout de même que j'aie son avis avant de nommer définitivement notre enfant. Pas parce que c'était un prénom spécialement propre à la controverse, qui allait m'attirer des critiques, mais parce que je trouve ça précieux, un prénom. Je veux bien qu'on essaie de le deviner, mais je refuse de le livrer comme ça à la première personne venue. Il me semblait que donner le prénom de mon enfant, c'était l'exposer au monde bien trop tôt, alors qu'il n'était pas prêt. D'ailleurs, jusque là, je n'ai eu aucune envie de le nommer. L'idée a commencé tout juste à faire son petit bonhomme de chemin quand on m'a dit que c'était une fille et que j'ai commencé à me dire qu'elle allait sans doute vivre. Et que quand bien même elle ne vivrait pas, ce serait tout de même ma fille et qu'elle mériterait autant un prénom choisi avec amour qu'un enfant vivant. Mais quand le prénom a surgi sans prévenir dans les allées de la culturette nowherelandaise, je ne l'avais même pas encore fait, ce petit bonhomme de chemin. 

Cependant, même si on ne m'a pas demandé pardon, j'ai pardonné. Je me suis dit que c'était moi qui étais ridicule d'en faire tout un plat. Et après tout, les personnes qui le demandaient avaient les meilleures intentions du monde et n'avaient aucune velléité de le contester. Dans un sens, ça m'a sans doute fait un peu de bien aussi, cette bienveillance des proches d'Apollon, même si sur le coup j'ai juste eu l'impression qu'on me déshabillait et qu'on me passait sous une douche froide. Ça m'a aidée à individualiser mon enfant, à lui donner de l'importance non pas en tant que foetus mais en tant que personne. Et je me suis dit que du coup, si on me posait des questions sur son prénom, je pourrais le donner et partager mon bonheur d'être enceinte d'un vrai bébé, plus seulement d'une idée.

Hier je l'ai regretté. Je n'ai pas vu le film éponyme, mais le prénom cristallise beaucoup de choses autour de lui. C'est une arme redoutable quand on a un désir de nuisance. Pour les parents, c'est un choix intime, mûrement réfléchi, ça fait partie intégrante de leur enfant. S'attaquer au prénom de leur enfant, c'est d'une part remettre en cause leur légitimité de parents et d'autre part s'attaquer à leur enfant. On ne peut pas aimer tous les prénoms, mais si tous ces prénoms existent, c'est parce que d'autres les aiment au point de les donner à l'être qui comptera le plus à leurs yeux. Dans ce contexte, c'est toujours extrêmement délicat d'émettre une critique.

Je n'ai pas bronché quand une de mes amies (en fait deux de mes amies) m'a dit vouloir appeler son fils N., qui est le prénom le plus donné dans notre pays. Je ne lui ai pas fait remarquer que ça manquait un peu d'originalité. Je lui ai dit que je trouvais ça joli, et d'ailleurs c'est le cas. Pourquoi insister sur ce qui me déplaît dans ce prénom, à savoir son extrême popularité, au lieu de lui signifier, sans mentir, qu'au niveau des sonorités, elle a fait à mon goût un bon choix ? Je n'ai jamais fait remarquer à ma belle-soeur qu'appeler sa fille K. avec un K, au lieu de C. avec un C, c'était lui donner le prénom d'un lionceau de dessin animé au lieu d'un joli prénom italien. Ça ne change pas le fait qu'une fois encore j'aime bien la sonorité du prénom et, même si je n'aurais personnellement pas fait ce choix-là, le K ne me dérange pas outre mesure. Je ne dis pas que je serais aussi indulgente dans tous les cas. Si un prénom me semblait massacrer véritablement toutes les règles de l'orthographe ou risquer de porter préjudice à l'enfant, je tenterais sûrement de le faire remarquer. Mais avec beaucoup de pincettes. Et si on me répliquait qu'on y avait déjà pensé et qu'on avait décidé que ce n'était pas si important que ça, eh bien je me tairais parce qu'après tout, ce ne seraient pas mes oignons. On ne meurt pas d'un prénom. Mais on peut en souffrir quand des personnes idiotes font des remarques déplacées : je ne veux certainement pas être la première de ces personnes idiotes. 

Tout ça pour dire que non, ce n'est pas anodin de dire à des futurs parents que le prénom de leur bébé fait penser à celui d'un animal domestique mourant. Je comprends qu'on puisse y penser. Je comprends même qu'on ne puisse pas se retenir de le signaler. C'est pour ça que quand ma mère m'a dit : "C'est mignon mais ça me rappelle surtout cette pauvre petite chatte qui est actuellement très malade.", je lui ai répondu tout d'abord un gentil sms plein de smileys qui disait en substance : "C'est vrai, on n'y avait pas pensé (comment y aurons-nous pensé alors que le prénom a été choisi avant même que les parents, et peut-être même les grands-parents, du chat en question voient le jour ?) mais après tout, ce petit chat ne va pas rester à la maison donc le fait que les prénoms se ressemblent ne devrait pas poser problème. J'espère en tout cas qu'elle ira mieux très vite." Je n'ai commencé à véritablement me sentir en colère que quand elle m'a répondu : "Le problème, ce n'est pas de donner des prénoms similaires aux chats et aux humains, le problème c'est que je pense vraiment que ce chat-là va crever.", comme si nous devions remettre notre choix en cause parce que le prénom de notre enfant lui rappellerait celui d'un petit chat mort, voire que ce prénom pourrait influencer négativement la destinée de notre fille. Elle m'a répondu que j'étais parano, que je sur-interprétais ce qu'elle disait, que jamais elle n'avait voulu contester notre choix. Si ce n'était pas le cas, pourquoi insister sur le fait que le chaton allait sans doute mourir ? Que la santé du chaton la préoccupe plus que le prénom de notre enfant, je suis tout à fait prête à le comprendre. Mais dans ce cas-là, qu'elle ne lie pas les deux. Qu'elle ne dise pas "Le problème (sous-entendu avec ce prénom), c'est qu'elle va mourir" mais "D'ailleurs, puisqu'on parle de ce chat, je suis assez pessimiste". Moi j'étais toute disposée à parler seulement du chat, à mettre mon enfant de côté (oui, des fois j'arrive à parler d'autre chose). C'était d'ailleurs le but de ma dernière phrase qui voulait simplement s'informer de l'état de santé du chaton. Moi ça m'allait très bien que la discussion s'arrête à "Tiens, c'est vrai que ça sonne un peu pareil mais c'est pas très grave."

Seulement ce n'était pas le cas. Ma mère adore me faire le coup de "Tu interprètes tout, je n'ai jamais voulu dire ça". A d'autres. A quelqu'un qui n'a pas étudié la littérature pendant cinq ans et qui sait très bien qu'on ne construit pas ses phrases au hasard. Surtout quand on est intelligente comme ma mère, surtout quand, comme ma mère, on adore appuyer où ça fait mal pour le simple plaisir d'appuyer où ça fait mal. Pas une seconde ma mère n'a envisagé de respecter notre choix (comme elle a d'ailleurs contesté le fait qu'on emménage ensemble, puis qu'on se marie, puis qu'on se marie "à notre façon"). Cette conversation n'a d'ailleurs pas commencé, comme dans le cas des parents d'Apollon, par : "Et vous avez des idées de prénoms ?", question toute naturelle à poser à des futurs parents qui viennent d'apprendre le sexe de leur enfant, la conversation a commencé par "Qu'est-ce que vous pensez de C. comme prénom ?" Euh, oui, d'accord, c'est très joli, mais mettons les choses au clair : on parle de notre enfant, là, ou du tien ? Non, je ne l'ai pas dit comme ça, même si je l'ai pensé comme ça. Je lui ai dit, avec force smileys une fois encore, que c'était un prénom que j'aimais beaucoup mais que ça faisait longtemps que le prénom de notre fille était choisi. Je comprends que ça ait pu la vexer. Mais à mon sens il y a des limites à ne pas dépasser dans la vengeance. Dire que le prénom était similaire à celui du petit chat suffisait amplement, pas besoin de répéter trois fois que le chaton en question allait avoir un destin funeste.

Surtout quand on s'adresse à quelqu'un qui se rend malade depuis quatre mois à l'idée de perdre son enfant.

Bref, cette aventure a encore changé, je crois, ma façon d'aborder la diffusion de notre prénom. Après qu'Apollon a vendu la mèche, j'étais disposée à le dire à tout le monde. Maintenant, je pense toujours que je vais le dire à ma famille proche (de toute façon pour ma mère, c'est trop tard, même si j'ai l'impression d'avoir fait une erreur monumentale, de lui avoir confié quelque chose de précieux qu'elle s'est empressée d'écrabouiller comme elle sait si bien le faire avec les choses précieuses que je lui confie), mais je ne crois pas que j'en parlerai à mes amis. Non pas que je pense que mes amis vont avoir une réaction similaire ("Ah tiens, ça me fait penser à mon hamster mort écrabouillé en mai dernier/à cette petite fille morte violée et dépecée il y a trois ans/à cette fameuse actrice porno qui a attrapé la syphilis dernièrement"), en règle générale mes amis me veulent beaucoup plus de bien que ma mère, mais je crois que j'ai besoin de garder une petite aura de mystère autour de mon enfant. Je vous montre mes échographies, je vous montre mon ventre, je n'ai pas envie de vous montrer mes tripes. Si vous le devinez, tant mieux, sinon vous le saurez bien assez vite. Ça n'empêche pas que je vous aime et que je vous estime.

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Commentaires
E
Hum... Comme moi je sais, j'interviens... Et... c'est de la connerie tout ça. Ce prénom est magnifique et... (j'aimerais en dire plus mais bon, je ne veux pas révéler quoique ce soit)! Et même si ça me fait bizarre de partager ce prénom avec toi, je te soutiens! ;)
C
Moi, je trouve ça très joli de garder le secret. <br /> <br /> (déjà, ça permet de se protéger parce que les gens font souvent des réflexions sur les idées de prénoms mais beaucoup moins quand l'enfant le porte déjà officiellement)<br /> <br /> Et si je t'essaie de deviner car ça m'amuse, je préfère que tu nous la présentes pour de vrai quand cette petite princesse aura montrer le bout de son nez. (Mais bon, je suis du genre à ne vouloir avoir que des surprises pour noel alors...)<br /> <br /> <br /> <br /> (j'aurai d'autres trucs à dire mais je suis crevée donc j'arrive pas à organiser mes idées > dodo. Mais je te fais de la traduction de nl bientôt promis ^^)
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