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Petites calomnies entre amis
Petites calomnies entre amis
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21 janvier 2014

Je vous avais promis un message sur

Je vous avais promis un message sur l'accouchement. Eh bien, les amis, ça se confirme, je suis une menteuse. Je ne posterai pas ce message sur l'accouchement aujourd'hui. Peut-être vendredi, après l'échographie. Le problème, quand on fait attendre un billet, c'est qu'on finit par le trouver moins intéressant que ce qu'il nous avait semblé de prime abord. Et qu'une nouvelle idée se met à sa place, qu'on a bien du mal à reporter, elle aussi, à plus tard.

Ce matin, je me demandais pourquoi j'encourageais les gens autour de moi à avoir des enfants. Non mais c'est vrai, je ne peux pas dire que j'adore être enceinte, et il serait prématuré de prétendre que je vais adorer être mère. Alors c'est quoi, cette manie de dire aux autres : "Allez-y, faites des gosses vous aussi !" Du sadisme ? De l'égoïsme ? Une volonté implicite de voir les autres souffrir ce qu'on endure ? D'attirer les autres dans un piège dans lequel on est tombé pour s'y sentir moins seul ?

Mais en fait, je crois surtout que c'est de l'honnêteté intellectuelle. Rien ne m'empêcherait de dire aux autres : "Fuyez (pauvres fous) pendant qu'il est encore temps." Ca leur ferait peut-être même plaisir, aux autres, de se dire que nous on est en train de se noyer dans l'océan de la parentalité pendant qu'ils sont bien tranquillou dans la barque du sexe protégé (oui, je suis douée pour faire des métaphores). Mais je ne suis pas du genre à cracher dans la soupe. Pour moi, dire que je serais plus heureuse si je n'étais pas enceinte serait un peu comme dire que je serais plus heureuse si j'étais célibataire. Vous savez, comme ces personnes en couple depuis longtemps qui vous mettent la main sur l'épaule et vous disent d'un air compatissant quand vous, vous êtes seule : "Ma chérie, comme je t'envie, tu n'imagines pas comme c'est compliqué de vivre avec quelqu'un..." Je peux le dire sans avoir l'air de me vanter, car célibataire, je l'ai été. Genre longtemps. Et Apollon, c'est mon premier amour, c'est pas comme si j'avais été une grosse allumeuse et que je m'étais calmée sur le tard. Bref, je sais ce que c'est d'attendre l'amour comme le graal. Je sais aussi que c'est compliqué de vivre en couple, parfois chiant, parfois pesant, mais j'ai assez de décence pour ne pas m'en plaindre devant les gens qui attendent toujours. Si j'étais malheureuse en couple, il ne tiendrait qu'à moi de ne plus l'être, et s'il y a bien quelque chose que je ne veux pas, c'est quitter mon mari.

Et je sais ce que c'est d'attendre comme le graal d'avoir "l'autorisation" de tomber enceinte, puis d'attendre comme le graal de tomber enceinte. Je sais aussi comme c'est chiant d'avoir des nausées (hier j'en ai encore eues pendant des heures et des heures), d'être fatiguée, de s'inquiéter pour son bébé, mais je ne considère pas que ce sont de bonnes raisons pour ne pas avoir d'enfant. Si j'étais malheureuse enceinte, il ne tiendrait qu'à moi de... Euh, non, en fait. Là je crois que c'est fichu. Même chez nos amis hollandais, qui fixent quand même leur limite au seuil de viabilité. A la limite chez nos amis ibériques (qui ont à la fois une des lois les plus dures sur l'avortement, puisqu'il est interdit en l'absence de raisons médicales ou psychologiques, et une des lois les plus souples puisque si tu plaides la détresse psychologique -autant dire que moi, je pourrais faire ça les doigts dans le nez, certificat du psy à  l'appui et tout-, tu peux avorter n'importe quand), mais ça ferait quand même beaucoup de démarches pour "annuler" une grossesse désirée. Alors même si c'est dur, je maintiens que je suis chanceuse. D'ailleurs, une grossesse, ça ne dure qu'un temps : ce qui compte au final, c'est le résultat.

Ce qui me fait le plus peur, si vous voulez tout savoir, c'est plutôt ce résultat. J'ai peur d'être aussi peu performante avec mon enfant que je le suis dans ma grossesse (être performante dans sa grossesse, pour moi, c'est la supporter avec le sourire, y prendre du plaisir, que ce soit parce qu'elle se passe bien ou parce qu'on a la force mentale de surmonter les difficultés) et au final de détester mon enfant autant que je déteste ma grossesse. D'ailleurs, quand je dis "je n'aime pas ma grossesse", j'ai toujours l'impression que les gens entendent : "je n'aime pas mon enfant". Et c'est vrai, qu'est-ce que j'en sais, que j'aimerai mon enfant ? J'ai eu de la chance jusque là dans mes principaux projets de vie : je voulais avoir un amoureux, j'en ai un, et tout se passe bien. Je n'ai pas de désilluson de ce côté-là. J'aurais très bien pu ne pas supporter du tout la vie de couple et avoir le choix entre vivre l'enfer ou finir seule. Rien ne dit pour autant que ça va continuer, que le projet bébé n'est pas, lui, une erreur. On ne peut pas gagner à tous les coups.

Mais si je réfléchis, j'ai aussi eu une grossesse compliquée pour Apollon. Une grossesse qui a duré un an environ. Un an bien loin du conte de fées, des certitudes d'amour éternel, une bonne année de désillusion. Evidemment, quand j'y repense, je repense en priorité aux bons moments : aux baisers volés à la sortie de la bibliothèque, aux fous rires toujours à la bibliothèque, aux croissants du vendredi matin à la bibliothèque (oui, la bibliothèque a joué un rôle crucial au commencement de notre vie de couple : l'amour en fac de lettres, c'est toujours plus ou moins lié aux livres), aux premières caresses à la bibliothèque enfin non, dans nos appart d'étudiants quand même, aux playlists qu'on s'échangeaient, aux lettres d'amour, aux sms de poèmes, aux petits cadeaux... Mais la réalité de cette première année, ça a surtout été beaucoup de doutes, de remise en questions, d'ambivalence, de sentiments négatifs, de pression, d'opression, de crises, de larmes, de ruptures à répétition, ça a été une grosse rupture de six mois, puis à nouveau des petites ruptures de quelques jours pendant plusieurs mois... non, mettre au monde notre amour, ça n'a pas été facile non plus.

Et au final, je ne regrette pas, car en ce moment, avec Apollon, je vis la plus belle période de ma vie. Je ne suis pas sans cesse contrôlée par mes parents comme je l'étais enfant, je ne suis pas complexée comme je l'étais adolescente, je ne me sens pas seule au monde comme quand j'avais 18 ans, je suis libre, aimée, heureuse... et j'espère que c'est parti pour durer, que l'âge adulte continuera à tenir ses promesses.

C'est pour ça que je le dis à ceux qui me le demandent, même si c'est dur, même si les premiers font caca et pipi partout parfois, si les seconds vous portent sur les nerfs, si les troisièmes vous font endurer neuf mois d'enfer, ayez des chats, des amoureux et des bébés. Si vous en avez déjà, mesurez votre chance, si vous en voulez, faites tout pour que cela arrive vite, et si vous n'en voulez pas... eh bien, je suppose que vous avez d'autres façons d'être heureux et j'en suis heureuse pour vous. Après tout, il n'y a pas non plus qu'une recette du bonheur :)

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Commentaires
C
ça c'est un joli article :) <br /> <br /> J'ai un chat, un amoureux et pas encore de bébé (et le projet est plutôt dans le lointain pour le moment) et je suis globalement heureuse, en tout cas heureuse de les avoirs tous les deux ;)
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